L'Enfant-Lune / Page 7

Publié le par Camille Butterfly


Me voilà sur le trottoir, il commence à faire frissonner, il doit faire tard. Un dernier regard vers la voûte céleste sans succès, Elle a disparu de ma vie.
Je m’assois sur un pas-de-porte, je suis un peu lasse, ou plutôt je crois que j’ai envie de rêver pour oublier ma tragédie.

Quelques heures s’écoulent sans que rien se passe, même mes rêves m’ont abandonnée. Juste ce regard sur l’affiche qui me revient sans cesse à l’esprit, sensation bizarre. Je sors le billet de la petite poche de mon veston blanc, au centre est inscrit d’une belle typographie en relief : « Dans l’ombre des Étoiles ». Du bout des doigts, je caresse les lettres. J’ai des fourmis dans le ventre.

Un chahut se fait entendre au bout de la rue. J’aperçois une bande de jeunes, complètement délurés, qui viennent dans ma direction. Arrivés à ma hauteur, ils me saluent de grandes révérences ratées au milieu d'un boucan infernal. Oh non ! des étudiants bourrés, il ne manquait plus qu’eux !

— Bonsoir Mad'moizelle… Ha ha ha pourquoi t’as pissé… vous êtes seule… t'abuses… ou madame… sur la bagnole… qu’est-ce vous… Oh ! belle… surgie de la nuit…

Ils parlent les uns sur les autres. Une chambre à l’étage de l'immeuble d'en face s’allume. Une blonde, dont je n’avais pas encore entendu le son de la voix, s’approche de moi pour mieux me voir étant devenue le centre de leur intérêt, puis s’écroule à mes pieds toujours sans avoir dit un mot.

— C’est une heure pour réveiller les gens qui travaillent ?

Un chauve en pyjama braille au-dessus de nous.

— T’as qu’à pas travailler ! Lui lance un des étudiants, accompagné d’une cannette qui s'éclate sur le mur.

— J’appelle les flics, vous ferez moins les malins !

Il referme violemment la fenêtre.

Ah non ! ça dépasse les bornes, je crie en me levant :

— Eh les jeunes ! allez jouer plus loin.

Ils se taisent, tous stupéfaits. Je me sens gênée. Juste un bref instant, car ils ne me laissent pas de répit m’empoignant par les épaules, me poussant dans tous les sens.

— Viens avec nous… faire la fête… s’amuser… ouuuh ouuuh c’est parti… lalalaa… lalalaa…

Nous voilà partis à la queue leu leu, à l'image d'une chenille se tortillant sous l'ivresse.

— Attend’… moi…

La blonde se relève péniblement pour nous suivre, mais a oublié d’ouvrir un œil.

Quelques rues passées, on arrive dans un grand appartement où la fête s'égosille. Des jeunes gesticulent sur la musique, d'autres sont affalés à même le sol entre les cendriers disséminés dans la pièce comme des mines explosives dans un champ de bataille. Les tables débordent de souvenirs de boissons alcoolisées vite vidées et d'autres jonchent directement sur le plancher.
J’essaie de mettre un pied après l’autre entre ces cadavres. Une bouteille m'atterrit dans les mains, du whisky ! Je crois que je vais rester un peu pour me changer les idées. Je suis déjà à plusieurs gorgées lorsque la blonde arrive enfin. Décidément, une pauvre fille, dès ses premiers pas en direction de la cuisine, elle a marché sur une cannette et valsé par terre, cette fois elle ne risque pas de se relever vu la chute.

— Bonne nuit ! Lui dis-je, en l’enjambant.



Publié dans Nouvelle 1

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